Histoire de la Bibliothèque de Genève

Ordonnance sur le Dépôt légal. Désormais tout imprimeur doit demander une autorisation du Petit Conseil avant de mettre sous presse puis déposer à la Maison de ville un exemplaire de chacune de ses impressions. Dans l'histoire du monde, il s'agit du deuxième Dépôt légal, après celui décrété par le Roi de France, François 1er en 1537. Cette pratique, liée à la censure, participe de la création de la Bibliothèque.

Première mention de la Bibliothèque. Dépôt par Robert Estienne des livres qu’il a imprimés depuis 1551 "pour faire une librairie" (bibliothèque). Il sera désormais question de la "bibliothèque de la Seigneurie".

Inauguration du Collège et de l’Académie et publication de leur règlement, rédigé par Calvin et Bèze. Première institution de ce genre en Suisse après la Bibliothèque de Bâle (1471), la Bibliothèque est ainsi historiquement la doyenne des institutions culturelles de Genève. Elle est située au Collège (actuel Collège Calvin), qui abrite aussi l’Académie, ancêtre de l’université de Genève.

Le principal du Collège a désormais la charge et la direction de la Bibliothèque.

Théodore de Bèze achète pour la Bibliothèque une partie des livres de Calvin.

En 1570, le premier catalogue recense 631 titres en 471 volumes. 

Première utilisation officielle du terme de "bibliothèque publique".

Premier registre de prêt qui soit conservé. En 1657, l’inscription des prêts dans un registre est systématisée.

Adoption d’un premier serment du bibliothécaire.

En 1668, à la suite d’abus, la durée du prêt est limitée à trois mois. À partir de 1677, certains documents sont exclus du prêt.

Adoption du premier règlement, imprimé en 1704. On prête les livres pour une durée d'un mois. La direction de sept membres se compose de trois représentants des Conseils et de quatre professeurs de l’Académie ou pasteurs, dont deux remplissent la fonction de bibliothécaires. La Bibliothèque s’installe dans la grande salle du premier étage de l’aile primitive du Collège. Elle comprend 3’500 volumes, une galerie de portraits, un médailler et une collection d'antiquités, de curiosités et d'instruments scientifiques qui vont se développer grâce aux dons, embryon des futurs musées de Genève. On prête les livres pour une durée d'un mois, même aux étrangers contre une caution. Création d’archives administratives (rédaction d’un nouveau catalogue, ouverture d’un registre des procès-verbaux des séances de la direction, d’un registre d’entrée et d’un grand livre des dons).

Décision de souscrire aux principaux périodiques scientifiques.

Le nombre de membres de la direction de la Bibliothèque est porté à 19, dont des représentants de la société civile (un médecin, un négociant, un homme de lettres et un artiste peintre).

Voltaire acquiert la "propriété de Saint-Jean" en 1755 et la nomme "Les Délices". Il y réside jusqu’en 1760 et y rédige la fin de L’Orphelin de la Chine, le Poème sur le désastre de Lisbonne et Candide. Le philosophe y accueille de nombreuses personnes, parmi lesquelles D’Alembert, en août 1756 pour la rédaction de l’article "Genève" dans l’Encyclopédie. C'est près de deux siècles plus tard que la maison devient l'Institut et musée Voltaire.

L'apport le plus remarquable sous l'Ancien Régime est certainement la collection de 88 manuscrits médiévaux enluminés achetée par le théologien genevois Ami Lullin à Paris et léguée à la Bibliothèque en 1756. 
En 1779, Jean Senebier, bibliothécaire de Genève, rédige le Catalogue raisonné des manuscrits conservés dans la Bibliothèque de la Ville et République de Genève qui recense 31’000 volumes.

Alors que Genève devient un département français, la Société économique, constituée pour administrer les biens des Genevois, reçoit la gestion des fonds de la Bibliothèque. Cette dernière était à l'origine placée sous la direction effective des autorités ecclésiastiques. 

Après la Restauration, les autorités ecclésiastiques reprennent provisoirement de l'importance dans la direction de la Bibliothèque.

La Bibliothèque devient "publique" avec l'ouverture d'une première salle de lecture. Une convention est passée entre la Société économique, en tant que propriétaire, et le Conseil municipal, en tant qu'administrateur. 

Les musées genevois sont créés progressivement. Jusqu'au 20e siècle, une partie des collections de la Bibliothèque est transférée au Musée académique (1820-1825), au  Musée Rath, puis au Musée d’Art et d’Histoire, ainsi qu’au Musée d’ethnographie.

Genève se dote d’une nouvelle Constitution à la faveur de la révolution radicale. Celle-ci attribue la Bibliothèque à la Ville de Genève et la soustrait ainsi aux autorités ecclésiastiques. Pourtant sa mission reste liée à l'enseignement supérieur, ce qui explique qu'elle va accompagner l'Académie dans ses nouveaux locaux aux Bastions. 

En 1865, le Conseil d'État décide d'ouvrir un concours pour la "construction de bâtiments destinés à l'instruction supérieure, à la Bibliothèque publique et aux Collections scientifiques qui appartiennent à la Ville de Genève". Le concours a lieu entre 1866 et en 1867, les plans pour les nouveaux bâtiments sont approuvés par arrêté du Conseil d'État, en accord avec l'administration du canton et celle de la Ville de Genève. Les travaux sont adjugés en 1868. 

Le chantier de construction de la Bibliothèque publique dure presque 5 ans. Gustave Revilliod donne 100’000 francs pour contribuer aux frais de construction et la famille Eynard-Lullin 50’000 francs pour l'achat de livres. Une aile du bâtiment constitue la Bibliothèque, une autre le Musée des sciences naturelles et le corps central est occupé par l'Académie. À l'inauguration en 1873, l'institution conserve un peu plus de 70’000 ouvrages. En 1876, l'Académie devient l'Université de Genève.

Le bâtiment des Bastions se révèle rapidement trop exigu et les transformations du bâti vont devenir régulières. En 1905 sont construites une nouvelle salle de lecture et des salles d'exposition. Plusieurs aménagements augmentent la capacité des magasins souterrains... les derniers en date sont achevés en 1987.

C'est l'année de la séparation de l'Église et de l'État. La Bibliothèque prend le nom de Bibliothèque publique et universitaire (BPU) dans le but de servir l'Université. Une convention est signée entre l'État et la Ville de Genève. Cette dernière en conserve la gestion. La même année, le Dépôt légal est aboli à Genève.

La Bibliothèque se voit confier la gestion de la bibliothèque de la villa La Grange, constituée par Guillaume Favre (1770-1851), armateur et cofondateur de la Société de Lecture. L'année suivante, son petit-fils, William Favre (1843-1918), lègue par testament à la Ville de Genève la Bibliothèque de La Grange. Depuis, la Bibliothèque de Genève en assure la gestion.

Achetée en 1929 par la Ville de Genève, la propriété des Délices abrite "La Galerie des Délices" dès 1945. En 1952, l'Institut et Musée Voltaire est créé, puis officiellement inauguré le 2 octobre 1954. Il faut attendre 1973 pour que l'institut soit formellement rattaché à la Bibliothèque publique et universitaire.

Il est réintroduit à Genève avec la promulgation de la loi cantonale du 19 avril 1967.

L'informatisation progressive des services s’opère. La Bibliothèque se rattache au Réseau romand (devenu Réseau des bibliothèques de Suisse occidentale, Rero). 

La Bibliothèque musicale de la Ville de Genève, fondée en 1960 pour fournir les partitions d’orchestre à l’Orchestre de la Suisse romande, ouvre ses portes au public dans la Maison des arts du Grütli. À l'arrivée au Grütli, les collections se diversifient: chanson française, jazz, musique du monde, musique de film, musique pop et rock.

Le Centre d'iconographie genevoise est créé. Il abrite le Service documentaire du Vieux-Genève et le département iconographique de la Bibliothèque publique et universitaire.

L’ensemble de la propriété des Délices fait l’objet d’une rénovation commencée en 1989 à l'occasion des célébrations du tricentenaire de la naissance de Voltaire.

La Bibliothèque inaugure pour la première fois de son histoire un espace où les livres sont accessibles au public librement et non stockés en magasin.

En décembre, un réseau Wifi est installé dans la salle de lecture des Bastions. L’utilisation est entièrement gratuite. Cette installation est la première du genre réalisée par la Ville de Genève.

Premiers documents numérisés sur RERO DOC, la bibliothèque numérique de RERO. 

La salle de lecture des Bastions est rénovée pour accroître le confort.

La Bibliothèque publique et universitaire organise une grande exposition au Musée Rath: Arts, savoirs, mémoire. Trésors de la Bibliothèque de Genève. À cette occasion, elle devient officiellement la Bibliothèque de Genève. La même année, la Musicale ouvre son premier espace documentaire en libre-accès. 

Le Centre d'iconographie genevoise est rattaché à la Bibliothèque et porte dès 2015 le nom de Centre d'iconographie de la Bibliothèque de Genève.

Première mise en ligne de titres de la presse quotidienne romande sur Le Temps archives, fruit d'une collaboration entre Le Temps, la Bibliothèque nationale suisse et la Bibliothèque de Genève. Les archives du Journal de Genève de 1826 à 1998 sont notamment mises en ligne. 

Les premiers manuscrits médiévaux de la Bibliothèque sont consultables sur e-codices.ch, bibliothèque virtuelle des manuscrits en Suisse.

La Bibliothèque présente ses livres anciens numérisés sur e-rara.ch.

Les fonds Rousseau (manuscrits, imprimés et iconographiques) conservés par la Bibliothèque de Genève, la Bibliothèque publique et universitaire de Neuchâtel, la Société Jean-Jacques Rousseau (Genève) et l’Association Jean-Jacques Rousseau (Neuchâtel) sont inscrits au registre "Mémoire du monde" de l'UNESCO.

Lancement du service de renseignements à distance InterroGE. Les bibliothécaires de plusieurs services de la Ville, y compris la Bibliothèque de Genève, répondent à toutes les questions du public en moins de trois jours. 

Les trois sites Internet institutionnels fusionnent pour ne devenir qu’un seul: www.bge-geneve.ch. Un dispositif technologique qui contribue à optimiser l'identité "Bibliothèque de Genève".

Fin du projet de rétroconversion du catalogue sur fiches. La collection est entièrement disponible en ligne. La rétroconversion consiste à saisir dans un système informatique les données contenues sur les fiches en papier. 

Initialisation du projet genevois de numérisation de la presse:  Il vise à numériser les trois quotidiens genevois: La Tribune de Genève, La Suisse et Le Courrier.

Un blog qui assure la valorisation des collections et la promotion du savoir-faire de l'institution est inauguré.

En 2019, un important réaménagement est mené dans les espaces publics du site des Bastions. Le confort des publics est amélioré. Conditionné pour une conservation à long terme, le catalogue sur fiches est numérisé et archivé. 
Un espace de restauration pour le public est créé.

Le 13 mars, toutes les institutions culturelles de Genève sont contraintes de fermer leurs portes en raison de la crise Covid-19. Stratégique pour la communauté académique, le service du prêt de documents de la Bibliothèque est l'un des premiers à rouvrir le 11 mai. Le 8 juin, les 4 sites rouvrent au public.  
Le 2 novembre, les quatre sites doivent à nouveau fermer, mais dès le 25 novembre, les services du prêt réouvrent aux Bastions et à La Musicale, suivis le 30 novembre par les autres sites. Retour à la normale le 1er mars 2021 avec la réouverture totale des quatre sites et des salles d'étude. 

Fruits d'années de travail, de nouveaux outils de recherche et de découverte des collections voient le jour. 
La nouvelle base iconographique est mise en ligne. Cette dernière comprend le catalogue raisonné numérique des daguerréotypes de Jean-Gabriel Eynard. 
En novembre, une nouvelle mouture de la base des manuscrits et archives privées est publiée. 
Le même mois, la première tranche du projet de numérisation de la presse romande est mise en ligne (Tribune de Genève, de 1879 à 1920). 
La Musicale rejoint onstage et publie plus de 2’300 programmes de concerts tirés de ses collections. 
C'est aussi en 2020 que la première exposition virtuelle est proposée au public. Trois autres expositions virtuelles suivent rapidement.
 

En rejoignant swisscovery - un réseau national regroupant près de 500 bibliothèques scientifiques - la Bibliothèque change d'échelle et garantit à ses publics l'accès à plus de 30 millions de documents de tous types.

Des milliers d'e-books, magazines, journaux, encyclopédies et revues sont mis à disposition gratuitement depuis le catalogue swisscovery. 

La villa La Grange accueille la rencontre entre les présidents américain Joe Biden et russe Vladimir Poutine. 

L'organisation des Prix Töpffer de la bande dessinée est confiée à la Bibliothèque, en partenariat avec le canton de Genève et en collaboration avec des écoles d'art. Au service de la politique de soutien au livre, la Bibliothèque assure la gestion des bourses pour la bande dessinée, l'illustration et les écritures numériques, ainsi que pour le prix de la Société genevoise des écrivains.

Le nombre de documents numérisés et mis en ligne augmente considérablement. Fin 2022, plus de 350’000 pièces d'archives et 45’000 images sont désormais consultables.

La maison de Voltaire retrouve le nom que lui avait donné le philosophe: Les Délices. Un accord est signé avec la Maison de l'histoire de l'Université de Genève, désormais hébergée sur le site et partenaire dans la conception du programme de médiation culturelle et scientifique. Les visites et événements publics se multiplient.

Faisant suite au crédit de pré-étude accordé en 2018, le Conseil municipal de Genève octroie un crédit destiné à l'étude de rénovation et d'extension du bâtiment des Bastions. Le concours d'architecture a lieu en 2023.