C’est le 22 mars 1850 qu’Eynard a pris la pose avec Henri et Marie de Regny, les enfants d’une nièce d’Anna, nés respectivement en 1841 et en 1843. Ce portrait a vraisemblablement été réalisé sur le domaine de Beaulieu, hypothèse qui reste à confirmer. Henri ne semble pourtant pas avoir sept ans – d’ailleurs il est encore en robe –, mais il était assez chétif, voire maladif ; il décédera à l’âge de vingt-neuf ans. Un autre daguerréotype non daté, sur lequel Henri et Marie sont habillés de façon similaire et coiffés de chapeaux identiques, a probablement été pris le même jour (fao 37664). Sur un double portrait effectué le 14 décembre 1850 (84.XT.255.33), on retrouve leurs paletots à larges carreaux. Eynard a enfilé une robe de chambre par-dessus sa chemise et son gilet. Ce vêtement d’intérieur tranche avec ceux des deux enfants, qui n’ont pas ôté leurs paletots, ni Marie, sa capote. Eynard pose dans cette tenue sur une dizaine de daguerréotypes, dans quatre modèles de robe de chambre différents ; celui-ci apparaît à cinq reprises. Les ornements végétaux qui le rehaussent ressortent avec une certaine précision, ainsi que les carreaux des paletots des deux enfants. Ces motifs très graphiques et contrastés répondent aux recommandations des traitées de daguerréotypie de l’époque (voir entre autres Lerebours 1843, p. 76). La composition est équilibrée et le cadrage serré, centré sur Eynard assis, entouré des deux enfants. Marie, debout, a la tête à peu près à la même hauteur que son grand-oncle. Elle esquisse un sourire, le regard tourné vers l’objectif, que son petit-frère fixe encore plus résolument. Tous deux sont bien conscients de sa présence, contrairement à Eynard qui feint de l’ignorer. De trois quarts, il demeure imperturbable, comme souvent. Il serre les deux enfants contre lui dans un geste affectueux et paternel qui confère une certaine tendresse à ce portrait très intime. La main de Marie posée sur la robe de chambre de son grand-oncle et la confiance avec laquelle le petit Henri est assis sur l’un de ses genoux révèlent les liens étroits qui unissaient le couple Eynard à la famille de Regny, présente sur de nombreux daguerréotypes. Une bonne maîtrise de la lumière et un temps de pose approprié font ressortir avec netteté l’expression de chaque figure et les motifs variés de leur habillement, même si l’état de toute évidence dégradé du verre, parsemé de petites taches, brouille la lecture. (I. Roland)
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