Les portraits de grands groupes sont toujours un exercice délicat qui suppose la maîtrise de nombreux paramètres. Ils ne sont pas rares dans la production d’Eynard, soucieux de mettre en scène sa famille, dix-sept personnes ici. Pour éviter une pose stéréotypée et donner l'impression d'un instantané, Eynard dispose ses modèles dans des attitudes variées, comme s’ils posaient en pleine nature, illusion créée par la toile de fond, qui représente un paysage. Anna Eynard et sa sœur Caroline sont toutes deux de profil, coiffées d'un bonnet de lingerie comme il était d'usage en extérieur pour les femmes d'âge mûr. L'atmosphère de douceur de cette vue tient à la dominante blanche des vêtements des femmes et des enfants. Seuls les deux hommes aux costumes sombres contrastent avec le reste du groupe, opposition qui donne un certain relief à cette image.
L’encadrement d’époque de ce daguerréotype, tel qu’on peut en trouver dans les collections du daguerréotypiste parisien Jean-Baptiste Louis Gross (Le daguerréotype français, Paris 2003, p. 290, ill. 210), est particulièrement remarquable. Si l’on rencontre une grande diversité de cadres, métalliques ou en bois, en sapin ou en palissandre, dans la production daguerrienne, Eynard opte le plus souvent pour une grande sobriété. Cette pièce se distingue par son cadre fantaisiste, somptueux et très ouvragé, d’un type peu courant dans le corpus des daguerréotypes d’Eynard. Un autre bel exemple encadre un portrait de groupe d’enfants (nc 01). (U. Baume-Cousam)