C'est avec beaucoup d'élégance qu’Eynard s'est représenté sur ce daguerréotype non daté. Il se rattache à la série des autoportraits qu'Eynard réalise sur le modèle de la peinture autour de 1850. En buste de trois quarts, il se tient dans une position conventionnelle avec le bras appuyé sur une table, perdu dans ses pensées. Il semble s’être conformé aux conseils de Noël Paymal Lerebours qui, dans son traité de photographie, en 1843, préconise aux modèles de regarder vaguement un objet éloigné pour éviter de fixer les yeux, : « Si l'esprit est activement occupé d'une pensée sérieuse ou agréable, suivant l’expression que l’on voudra avoir, mais en ne se préoccupant nullement de l’objet vers lequel les yeux seront tournés, le portrait sera plein d'animation et d'intelligence » (Lerebours, Paris 1843, p. 75).
Toute la beauté de ce portrait tient dans l'habileté d'Eynard à jouer avec les contrastes entre les zones d'ombre et de lumière, ainsi que dans l'écho que se font les textures du gilet et de la nappe, dont les teintes variées font ressortir le noir de la veste et de la cravate. On retrouve la même nappe à motifs sur le daguerréotype 84.XT.255.56.
Une légère colorisation rosée vient iriser les lèvres et le haut du front, sans doute dans l’intention de donner plus de réalisme à cet autoportrait. (U. Baume-Cousam)