La cause animale en Suisse à la seconde moitié du 19e siècle
La cause animale en Suisse à la seconde moitié du 19e siècle

La mère apeurée s’est cachée tandis que le père voulant intervenir se voit, lui aussi, menacé par la fourche que tient son fils. Drame familial? Folie meurtrière? Le journal souligne la cruauté du geste contre les animaux et jette l’opprobre sur l’auteur de ce drame tout en relevant l’émotion collective suscitée.

Ce drame sans suite médiatique, a pourtant marqué les esprits et devient indice des risques que la condition humaine porterait en elle. En avril 1868, lors de la création de la SPA genevoise, l’événement est relaté par l’instituteur, cheville ouvrière de la mise en place de l’association, Eugène de Budé. L’événement exemplifie de facto, une thèse largement partagée dans les groupes européens qui se multiplient en faveur de la cause animale (137 sociétés dont 17 en Suisse à cette date). La nature humaine se révélerait dans les comportements pervers des enfants envers les animaux. Pour les initiateurs du projet de société protectrice des animaux, éduquer l’enfant au respect de la vie animale est la condition nécessaire pour éviter la contagion de la violence entre humains. Entre malédiction du péché originel, besoins de la médecine expérimentale, recul du seuil de tolérance de la vue du sang et de la violence physique, les défenseurs des animaux plaident aussi pour une rationalité inscrite dans l’utilité sociale promue au sein de la société d’utilité publique genevoise dont émane directement la SPA. Paysans, commerçants, vous n’avez pas d’égard pour les animaux, vous vous comportez non en roi mais en tyran à leur égard? C’est votre rendement productif et votre profit qui en pâtiront. Telle est la donne morale et pratique en cette seconde moitié du 19e siècle, dans l’histoire tumultueuse des rapports entre les humains et le règne animal.
Symptomatique des nouvelles sensibilités, au milieu du 19e siècle, écorcheries et boucheries se déplacent des rues basses, en plein air, vers un abattoir fermé, en aval du Rhône, facilitant l’écoulement du sang animal.


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